" jeux d'enfants " de Yann Samuell

Cap ou pas Cap? Qui n'a jamais lâché le fameux " Chiche! " qui nous met au défi? Au-delà de cette question, Yann Samuel a démarré sa carrière en traitant les aléas de ce jeu et a décortiqué pour nous, dans sa première œuvre, les conséquences de l'utopie.

Et le film commence comme son titre: par des Jeux d'enfants. On redécouvre, tout émerveillés, l'odeur des soldats de plomb et des petits chevaux de bois. L'univers Chamallow des bonbons et bisous acidulés. Bref, la fantaisie légère et colorée de l'enfance. Dans une première partie donc, l'auteur fait évoluer ses petits écoliers dans un univers irréel, ultra Technicolor, qui ne va pas sans rappeler la beauté plastique d'Amélie Poulain.

A 10 ans donc, Julien et Sophie sont confrontés aux premières cruautés de l'existence: la maladie, l'exclusion sociale, la moquerie des autres. Bref, tout ce qui va susciter chez eux le refus de grandir et l'envie d'échapper au monde des adultes.

Ainsi naquît le jeu. De 10 à 35 ans, il va continuer, évoluer aussi. Toujours autour d'une boîte en fer, par de petits défis innocents et enfantins, puis par de véritables mises à l'épreuve, jusqu'à devenir un jeu dangereux et pervers. Jusqu'à ce que la vie les rattrape, à vrai dire. Pour les ramener à la réalité. A la conscience donc. Celle d'avoir tout détruit autour d'eux, d'avoir perdu des êtres chers et surtout d'avoir raté un bonheur certain. Par lâcheté, refusant la vraie vie qui se construit par les épreuves, ils vont souffrir et se faire souffrir, s'enfermer dans leur délire.

Les acteurs: Marion Cotillard et Guillaume Canet incarnent à merveille ces personnages misérables, destinés au drame.

Sous cette fable contemporaine, qui évoque le vieil adage du " manger son pain noir avant son pain blanc ", se cache une belle morale. Un peu à la manière de La Fontaine; la cigale qui voue ses journées aux plaisirs et la fourmi travaillant au bonheur, le film nous rappelle tout simplement que la vie n'est pas un jeu. Que le jeu, comme une justice, nous détruit et finit par provoquer avec le temps, de vilains scrupules et des regrets alors insupportables pour la conscience. Gare à ceux donc qui délirent côté pile, en rose, la face viendra et là… Restera alors qu'une belle œuvre pouvant remettre certains dans le droit chemin…


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Dorothy Malherbe le 2003-10-20