" Malabar Princess " de Gilles Legrand

Le début avait bien commencé. Le bruit délicat du vent, un panorama sublime sur la montagne; bref, une vision grandiose qui promettait un décor assurément digne d'un cliché de Géo. Le premier film de Gilles Legrand se réduira hélas à cette carte postale enneigée du Mont-Blanc. Non qu'il soit totalement inintéressant, mais une première oeuvre permet généralement un ébauchage de nouveau talent. Or l'opus présent ne s'inscrit justement pas au tableau d'honneur. Dans le massif du Mont-Blanc où a disparu 5 ans plus tôt sa maman, Tom, 8 ans, est conduit chez son grand-père pour la nouvelle année scolaire. Très vite, le vieil ermite va devoir affronter les multiples questions du gamin sur la tragédie passée. Disparaître pour Tom, ce n'est pas mourir, et le petit garçon semble bel et bien déterminé à retrouver sa mère disparue sur le glacier. Le film est donc cette quête incessante de savoir sur le mystère. L'enfance vouée au manque et à l'absence. L'identité qui se forme dans la fragilité et les secrets de famille trop lourds à porter. Malgré cette coloration affective qui sublime l'oeuvre dès le début, l'impression de déjà-vu persiste et les clichés tombent. De trop nombreuses références (mention à Dolto, le petit Robert, Tintin et le crash du Malabar Princess en 1950...) ,des seconds rôles dont on cherche encore l'intérêt (via Michèle Laroque, Claude Brasseur ...) et un dialoguiste trop axé sur la répétition et le non-sens (via Ben Laden et les jeux vidéos!). En passant par une caméra constamment mobile, qui se perd dans la démesure et rate hélas le cadrage pour des effets de style inutiles (Cf fondu-enchaîné sur la jument Marylin!). Sans oublier les misérables stéréotypes qui reprennent les thèmes de la vieillesse archaïque contre une jeunesse fine en argot, l'institutrice quasi-psychologue, trop impliquée... Bref, le récit s'essouffle et manque inévitablement de rythme. La beauté visuelle des décors naturels ne parvient pas à dynamiser l'histoire et l'on s'ennuie ferme. Malgré tout, Malabar Princess demeure un bon divertissemment familial, qui aborde des sujets capitaux: la résignation, l'enfance, le traumatisme... Ainsi qu'un premier rôle émouvant, énergique et curieux, tenace et accessoirement dyslexique , qui affronte courageusement ses cicatrices et ses idéaux (interprété par Jules-Angelo Bigarnet, talent prometteur...). Jacques Villeret, quant à lui, campe ce vieux solitaire silencieux, sans profondeur hélas, ni psychologie; ce qui ne lui permet pas de s'imprégner du rôle, tant dans l'esprit que dans la chair. Un passage à 20h50, sur France 2, un mardi soir, aurait suffit à faire connaître le film. Dommage...
Dorothy Malherbe le 2005-03-20